1896, la France fait naitre un port à Thessalonique
C’est à la fin du XIXᵉ siècle, alors que le canal de Suez vient d’être inauguré (en 1869) et que la Méditerranée orientale occupe une place majeure dans le commerce mondial, que Thessalonique tire parti de sa situation géographique et entame son désenclavement : on entreprend la démolition de la portion côtière de ses fortifications, la construction d’importantes infrastructures ferroviaires vers les Balkans et Constantinople, ainsi que la réalisation d’un port artificiel, infrastructure indispensable à son développement économique.
À cette époque, la quasi-totalité des travaux portuaires en Méditerranée orientale est réalisée par des entreprises françaises, qui bénéficient de l’expertise et du savoir-faire des ingénieurs issus des grandes écoles. Ce sont naturellement eux qui réalisent les premières études pour Thessalonique, entre 1872 et 1892, largement inspirés par le port de Marseille nouvellement construit. La réalisation est finalement confiée à Edmond Bartissol, en 1896. L’entrepreneur français de travaux publics a déjà conduit de nombreux chantiers à l’étranger : il a notamment participé au percement du canal de Suez et au développement de chemins de fer, ponts et tunnels en Espagne et au Portugal. Il délègue le projet et la conduite des travaux au Centralien Jules Robert, qui reprend les plans des ingénieurs précédents.
D’éminentes entreprises françaises telles que la Société de construction des Batignolles, la Société anonyme ottomane du port de Salonique d’Edmond Bartissol et le Bureau technique de béton armé de François Hennebique sont également impliquées dans ce projet novateur. Le contrat inclut la construction du port, mais aussi son exploitation. Quatre bâtiments verront le jour, sur les six initialement prévus. Le plus imposant, celui des douanes, de 200 mètres par 25, est réalisé en béton armé, une technique ultra-moderne mise en place au début des années 1890 par le fameux Hennebique. L’édifice, restauré par la société française Fraissinet à la fin des années 1940, est aujourd’hui le seul des quatre à avoir été préservé. Emblématique, il abrite toujours le bureau des douanes, ainsi que le terminal des ferries pour passagers.
Le port a aussi largement évolué depuis la reprise du droit d’exploitation par l’Etat grec en 1930. Après des extensions et développements successifs (nouveaux quais, bâtiments et équipements), il est devenu un port industriel et commercial majeur et un accès principal à la mer pour les pays de l’Europe du Sud-Est. Aujourd’hui, le lien avec la France reste fort puisque la société Terminal Link, filiale du groupe français CMA-CGM, fait partie du consortium ayant pris une participation majoritaire dans le port de Thessalonique en 2017.
Source des illustrations : Bibliothèque de l’université Aristote (ΑΠΘ) | Collection Trikoglou