Des étudiants et des professeurs grecs rencontreront l’auteur Neige Sinno pour discuter de son livre Triste Tigre le mercredi 03 avril 2024 à 19h00 par vidéoconférence.
Plus de 100 étudiants et professeurs francophones de neuf universités grecques participantes auront l’occasion de s’entretenir avec la troisième des quatre finalistes du prix de littérature française le plus prestigieux en 2023, dans le cadre de la cinquième édition du Prix Goncourt Grèce.
L’échange, qui aura lieu par zoom (en français), sera diffusé en live-streaming.
Veuillez cliquer sur le lien ci-dessous afin de rejoindre le webinaire :
https://us06web.zoom.us/j/84249409013
Le processus est le suivant : les étudiants lisent les quatre livres de la liste de présélection de l’Académie et participent ensuite à des réunions zoom avec chaque auteur. À l’issue de leurs réunions, ils votent et désignent le lauréat du prix Goncourt pour la Grèce, qui peut être ou non le même que le lauréat du prix en France.
Le Choix Goncourt est organisé par l’Institut français de Thessalonique en partenariat avec l’Institut français de Grèce et l’Académie Goncourt. Cette année encore, l’événement attire un grand nombre d’étudiants, presque 100, ce qui montre que le Choix Goncourt pour la Grèce a été accueilli avec enthousiasme par les étudiants francophones de quinze départements de neuf universités grecques.
Cette année, les livres de la liste sont les suivants :
Humus, Gaspard Koenig
Sarah, Susanne et l’écrivain, Éric Reinhardt
Triste Tigre, Neige Sinno
Veiller sur elle, Jean-Baptiste Andrea
Qui est Neige Sinno
Elle est une romancière française. Après une thèse en littérature américaine, elle se consacre à l’écriture et à la traduction.
Elle a d’abord publié un recueil de nouvelles, « La vie des rats » et un essai sur les figures du lecteur « Lectores entre líneas: Roberto Bolaño, Ricardo Piglia y Sergio Pitol », qui a remporté le prix Lya Kostakowsky. »Le camion » (2018) est son premier roman.
Pendant son enfance et son adolescence dans les Hautes-Alpes, elle subit les viols répétés de son beau-père. Elle porte plainte en 2000 et celui-ci est condamné à neuf années d’incarcération. Elle en tire la substance de son dernier ouvrage : « Triste tigre », référence au poème « The Tyger », de William Blake. Triste Tigre a reçu le Prix littéraire Le Monde et le Prix Femina 2023
Elle vit aujourd’hui avec sa famille au Mexique.
Triste tigre
« Il disait qu’il m’aimait. Il disait que c’est pour pouvoir exprimer cet amour qu’il me faisait ce qu’il me faisait, il disait que son souhait le plus cher était que je l’aime en retour. Il disait que s’il avait commencé à s’approcher de moi de cette manière, à me toucher, me caresser c’est parce qu’il avait besoin d’un contact plus étroit avec moi, parce que je refusais de me montrer douce, parce que je ne lui disais pas que je l’aimais. Ensuite, il me punissait de mon indifférence à son égard par des actes sexuels. »
Entre 7 et 14 ans, la petite Neige est violée régulièrement par son beau-père. La famille recomposée vit dans les Alpes, dans les années 90, et mène une vie de bohème un peu marginale. En 2000, Neige et sa mère portent plainte et l’homme est condamné, au terme d’un procès, à neuf ans de réclusion. Des années plus tard, Neige Sinno livre un récit déchirant sur ce qui lui est arrivé. Sans pathos, sans plainte. Elle tente de dégoupiller littéralement ce qu’elle appelle sa « petite bombe ». Il ne s’agit pas seulement de l’histoire glaçante que le texte raconte, son histoire, une enfant soumise à des viols systématiques par un adulte qui aurait dû la protéger. Il s’agit aussi de la manière dont fonctionne ce texte, qui nous entraîne dans une réflexion sensible, intelligente, et d’une sincérité tranchante. Ce livre est un récit confession qui porte autant sur les faits et leur impossible explication que sur la possibilité de les dire, de les entendre. C’est une exploration autant sur le pouvoir que sur l’impuissance de la littérature. Pour se raconter, la narratrice doit interroger d’autres textes, d’autres histoires. Elle nous entraîne dans une relecture radicale de Lolita de Nabokov, ou de Virginia Woolf, et de nombreux autres textes sur l’inceste et le viol (Toni Morrison, Christine Angot, Virginie Despentes). Comment raconter le « monstre », « ce qui se passe dans la tête du bourreau », ne pas se contenter du point de vue de la victime ? Jusqu’à reprendre la question que le poète William Blake adressait au Tigre : « Comment Celui qui créa l’Agneau a-t-il pu te créer ? » (The Tyger). Le récit de Neige Sinno nous fait alors entrer dans la communauté de celles et ceux qui ont connu « l’autre lieu », celui de la nuit et du mal, qui ont pu s’en extraire mais qui en sont à jamais marqués, et se tiennent ainsi à la frontière des ténèbres et du jour. Nulle résilience. Aucun oubli ni pardon. Juste tenter de tenir debout, écrire son récit comme une « petite bombe artisanale qu’on fait exploser tout seul chez soi, dans l’intimité de la lecture. Elle a l’intensité et la fragilité des choses conçues dans la solitude et la colère. Elle en a aussi la folle et ridicule ambition, qui est de faire voler ce monde en éclats. »
Les universités et les départements qui participent cette année sont:
– Université Aristote de Thessalonique (Département de Langue et de Littérature françaises)
– Université Démocrite de Thrace (Département de Droit)
– Université Ouverte de Grèce (Master Didactique du FLE et Master Création Littéraire, département de Langue et de Littérature françaises)
– Université nationale et capodistrienne d’Athènes (Département de Langue et de Littérature françaises)
– Université de Thessalie (Départements : études Linguistiques et Interculturelles, Ingénieur Électricien, Experts Agricoles, Entrainement Pédagogique, Médecine, Physiothérapie)
– Université Ionienne de Corfou (Département de Langues Etrangères, de Traduction et d’Interprétation),
– Université du Pirée (Département d’Études internationales et européennes)
– Université de Ioannina (Études Musicales),
– Université de l’Egée à Mytilène-Lesbos (Laboratoire d’Institutions Sociales et Politiques)
Le Choix Goncourt de la Grèce organisé à Thessalonique
Tout le monde connaît le Goncourt, le prix littéraire le plus convoité de France, créé par les frères écrivains Jules et Edmond de Goncourt à la fin du XIXᵉ siècle, qui récompense, chaque automne, un roman d’expression française. L’auteur et son éditeur sont alors assurés du succès de l’ouvrage et de ses traductions à l’étranger.
Mais ce qui est moins connu est le fait que le Goncourt est également décliné hors de France, notamment en Grèce.
Le concept est né en Pologne à l’initiative du directeur de l’Institut français de Cracovie : en 1998, celui-ci propose à l’Académie Goncourt qu’un jury d’étudiants francophones choisisse son lauréat parmi des romans issus des présélections du prix Goncourt. Ces « Choix Goncourt », développés depuis, existent aujourd’hui dans une trentaine de pays.
En Grèce, c’est Pierre Assouline, journaliste et romancier membre de l’Académie Goncourt, qui, lors d’un déplacement à Thessalonique en mars 2019, soumet à l’Institut français l’idée d’organiser un Choix Goncourt. L’équipe, enthousiaste, se saisit aussitôt du projet et lance le premier Choix Goncourt dans le pays la même année, en partenariat avec l’Institut français de Grèce à Athènes et l’Académie Goncourt à Paris.
Choix Goncourt de Grèce
2023
Makenzy Orcel, Une somme humaine
2022
Mohamed Mbougar-Sarr, La Plus secrète mémoire des hommes
2021
Djaili Amadou Amal, Les Impatientes
2020
Jean Paul Dubois, Tous les hommes n’habitent pas le monde de la même façon